“To open the way to the stars is the most important mission of men in this century”
Paul Van Hoeydonck, 1971
C’est le 2 août 1971 qu’eut lieu un événement absolument inédit dans les annales de l’histoire, à savoir l’installation d’une œuvre d’art sur une planète autre que la terre. L’œuvre porte le titre de Fallen astronaut et est une création de l’artiste belge Paul Van Hoeydonck. Aucun autre artiste au monde ne s’est intéressé de manière aussi engagée à l’espace et à sa conquête par l’homme. Lorsque Louise Tolliver Deutschmann, de la Wadell Gallery à Cape Kennedy, eut l’idée de faire déposer une oeuvre de Van Hoeydonck sur la Lune, c’était, tout naturellement, le seul artiste auquel elle pouvait penser pour un tel projet.
Fallen Astronaut, 1971Déposé sur la lune le 2 août 1971
par l'équipage d'Apollo 15
Formé de 1949 à 1953 à l’Institut Supérieur d’Art et d’Archéologie d’Anvers, Van Hoeydonck s’est toujours efforcé de situer les choses dans leur contexte historique. C’est le célèbre critique d'art Pierre Restany qui, en 1964, l’a appelé « l’archéologue du futur », cette formule constitue la synthèse paradoxale de l’œuvre de l‘artiste. Il s’agit d’une œuvre où l’avenir de l’homme, réduit à un certain nombre d’archétypes revêtant un caractère prophétique, est situé dans l’espace. Réalité qui, pour Van Hoeydonck, va toujours de pair avec la science-fiction, préfiguration de la réalité.
Dans un premier temps, l’autodidacte Van Hoeydonck semblait vouloir se concentrer sur l’art phénoménologique en faisant des toiles figuratives sans relief où se marque une préférence pour l’agencement géométrique. Il n’est pas étonnant, dès lors, que le choix des sujets s’inspirait essentiellement de l’architecture. À force d’abstraire la réalité, il en arrivera finalement à une négation totale de celle-ci, ne gardant, à partir de 1954, que la seule représentation, l’abstraction pure. Van Hoeydonck, en effet, a réduit les formes géométriques, à un jeu d’ombre et de lumière, faisant surgir de la toile des vibrations de lumière par la technique monochrome, les light-works.
Dès 1957, son œuvre redeviendra figurative par la visualisation du cosmos au travers d’un mode d’expression adapté à l’imagination humaine. Pour trouver une expression plus concrète encore, Van Hoeydonck intégrera également des petites structures en plexi dans ces reliefs pratiquement incolores.
La période 1957-61 peut être considérée comme celle de préparation à la carrière spatiale de l’artiste. Une nouvelle réalité surgit de la concrétisation de l’immatériel, donnant forme aux théories de la relativité d’Einstein. Sous nos yeux, le matériel devient immatériel, l’espace devient visible. Lucio Fontana un jour dit à l’artiste : « … moi je pratique des ouvertures dans l’espace. Toi, tu montres ce qui se cache derrière. »
Lorsque les light-works seront tournés en dérision, l’opinion trouvant que ces œuvres finalement ne montraient rien, Van Hoeydonck se mit à produire avec humour et sarcasme ses Boîtes à monocles (1960-1961). Ces étuis précieux, prédestinés à conserver des objets nobles, il devait les remplir de verres à lunettes et de clous. À côté des verres à lunettes, il déposait sur un velours très doux des roses en papier. Le souhait de l’artiste était d’attirer l’attention du public, sur un mode ironique ayant cependant sa justification plastique et poétique, sur le fait qu’il fermait les yeux sur ce qu’il faisait. C’est à cette occasion que devait se manifester pour la première fois avec éclat les talents « d’assembleur » de l’artiste, encore qu’il avait déjà réalisé entre 1954 et ’56 des jouets en relief, mais dans ces créations prédominaient encore les formes géométriques.
Boîte à monocle à la fourchette au trésor caché, 1961Toutes photos @Paul Van Hoeydonck. Publiées ici avec l'aimable autorisation de l'artiste.