Manga, la tête dans les étoiles

Le genre continue d’attirer les auteurs contemporains et il est même possible de constater un regain d’intérêt ces dernières années, lié notamment aux préoccupations quant au devenir de notre planète. Citons deux œuvres en particulier : Planetes de Makoto Yukimura et La Cité Saturne de Hisae Iwaoka.

planetesManga en 4 tomes publiés de 2001 à 2004 au Japon (actuellement entièrement traduit en français), Planetes est la première série de Makoto Yukimura, né en 1976. Située en 2075, l’histoire raconte les aventures d’une équipe d’astronautes attelée à la récupération des débris spatiaux (anciens satellites, fragments d’anciennes fusées à étages), métier dangereux et peu gratifiant. Le récit se concentre sur la personnalité et les aspirations des quatre principaux personnages, notamment Hoshino, qui verra son rêve d’intégrer la première mission vers Jupiter se concrétiser. Très riche dans la description des psychologies de chacun des intervenants, dans leurs rapports entre eux et avec l’espace, Planetes se caractérise également, comme la plupart des séries contemporaines et Gundam, par un grand souci de vérisme.  L’équipement, la vie à bord, les troubles physiques ou psychiques liés à l’apesanteur… sont décrits avec minutie et justesse.

saturneCe souci du détail se retrouve chez Hisae Iwaoka, mais tempéré là par un style plus rond et poétique. Dans La Cité Saturne (« Dosei Mansion » en japonais), manga en 8 tomes publié de 2006 à 2011, il nous présente le jeune Matsu. Dans ce futur indéterminé, la Terre toute entière est devenue une réserve protégée et les hommes ont dû trouver refuge dans un énorme anneau transparent entourant la planète. Baptisée Cité Saturne en hommage aux anneaux de cet astre de notre système solaire, la colonie est divisée en trois niveaux, transposition physique de la hiérarchie sociale. Matsu, résident de troisième niveau et laveur de vitres comme son défunt père, nous emmène à la découverte des habitants de la Cité, son métier lui permettant d’une certaine façon de transcender les classes sociales. L’espace ici, comme dans certaines œuvres plus anciennes (Galaxy Express 999 de Matsumoto), est plutôt un prétexte à un voyage au cœur de notre humanité, dans ses bons et moins bons aspects.

 

 

En conclusion, la SF spatiale n’est peut-être pas le genre le plus développé dans le manga, souvent associé ou éclipsé par les mecha (robots), mais il a donné lieu à quelques-unes des œuvres majeures de la bande dessinée japonaise. Si les séries des années 1970-1980 jouent la carte de l’invention fantasque, typique de l’époque, les œuvres plus récentes se démarquent souvent par une volonté de crédibilité et de réalisme, même si l’espace reste surtout le contexte dans lequel se jouent des drames purement humains.

Édith Culot
Août 2012

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Édith Culot
est
historienne de l'art. Ses principales recherches portent sur les laques japonaises. Elle est collaboratrice du Centre d'Études Japonaises de l'ULg.

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