La bande dessinée, évolution et surproduction
L'état de la bande dessinée

Reprenant les différentes interventions d'un colloque tenu à Angoulême à l'été 2008, L'État de la bande dessinée, un ouvrage coordonné par Benoît Peeters, permet de mieux comprendre l'évolution récente du 9e Art et sa situation actuelle, notamment économique.

« Surproduction ». Le mot revient dans tous les textes. La bande dessinée serait aujourd'hui en crise à cause d'une inflation inconsidérée de parutions devenues quasi quotidiennes. En 1996, 650 titres furent publiés en France. Onze ans plus tard, ils étaient près de 4000. Et en 2008, près de 5000 titres sont sortis de presse. Benoît Peeters, maître de conférences au Département des Arts et Sciences de la Communication, coordinateur et éditeur de l'ouvrage, rappelle avec humour que, dans un livre écrit au début des années 1990, il évoquait la crise du secteur en raison... d'une inquiétante diminution du nombre de sorties annuelles.

En une quinzaine d'années, le milieu éditorial de la BD s'est en effet totalement métamorphosé. Sa vraie crise, il l'a connue entre 1985 et 1995, au lendemain de l'effervescence des années 1970 qui l'a vu sortir de l'édition pour la jeunesse et, explique Fabrice Piault, spécialiste de l'économie du livre, poser, «sur le plan créatif au moins, les bases de la bande dessinée contemporaine pour adultes». Mais l'édifice était économiquement fragile et a bien failli s'écrouler au cours de la décennie suivante, marquée par une forte baisse du nombre de nouveautés par an, un important mouvement de concentration éditoriale et un net recul qualitatif, principalement sur le terrain de la BD d'auteurs.

Au mitan des années 1990, la bande dessinée a entamé une remontée, jamais stoppée depuis, suite à la combinaison de multiples facteurs. Notamment le développement d'une BD de genre (surtout la fantasy dans la lignée des jeux de rôles et jeux vidéos) et l'irruption de séries best-sellers (telles celles scénarisées par Jean Van Hamme, Thorgal, XIII ou Largo Winch). Mais aussi l'apparition de nouveaux auteurs - dans le giron de la maison d'édition L'Association principalement -, qui produisent vite et beaucoup , comme Trondheim, Sfar... et d'un nouveau type d'ouvrages, le roman graphique qui, d'un format différent, souvent en noir et blanc et investissant des domaines jusqu'alors inexplorés comme l'autobiographie, va toucher un lectorat plus intellectuel (et plus féminin).

BD manga

 

À l'autre extrémité, l'émergence du manga va attirer un public jeune qui, de toute façon, ne se destinait pas à la BD classique franco-belge. « Il est probable, remarque Benoît Peeters, que le monde de la bande dessinée serait plongé dans une crise très grave si le manga n'avait pas permis de conserver le volume global du marché. » Les chiffres parlent d'eux-mêmes : en 2007, les mangas représentaient près de 40% de la production d'albums pour 35% des ventes en nombre d'exemplaires.

 
BD manga

 

Page : 1 2 suivante