Hervé Le Corre, Prendre des chiens pour des loups

LeCorreRongé jusqu’à l’os. C’est peut-être la meilleure expression pour qualifier le personnage de ce roman noir, mais aussi le projet narratif du livre, voire le trajet émotionnel qui attend son lecteur. Auréolé du succès public et critique d’Après la guerre, polar historique, savant, dense et lyrique, Hervé Le Corre ronge soudainement tous les oripeaux de la flamboyance romanesque pour saisir à la gorge la quintessence du noir. 

L’intrigue, simpliste, classique, peut-être même rebattue, tient en quelques lignes : Franck sort de prison où il vient de passer cinq années pour un braquage raté commis avec son frère Fabien qui a réussi à prendre la fuite. Mais c’est la petite amie de Fabien, mystérieusement disparu, qui vient le chercher à la sortie du pénitencier. Il fait chaud, beaucoup trop chaud, et le corps de cette jeune femme inconnue et débridée rend Franck fou de désir. En attendant le retour du frérot, elle l’invite à venir dormir dans la sordide demeure qu’elle partage avec ses parents dégoûtants, un molosse monstrueux et une petite fille angélique qui ne devrait pas grandir là-bas. Tout est poisseux et malsain, et, à l’instar de Franck, le lecteur sait qu’il faut partir au plus vite, fuir sans se retourner. Mais à l’instar de Franck, il sait aussi qu’il est déjà trop tard et qu’il est englué, retenu prisonnier dans une toile tissée par une relecture moderne de la femme fatale.

L’écriture est tour à tour sèche, rude et violente, moite, vénéneuse et sexuelle. Elle s’adresse directement aux tripes et propose l’un de ces grands romans noirs crépusculaires où le monde ne se donne à voir qu’entre chiens et loups.

 Dick Tomasovic

 

Hervé Le Corre, Prendre des chiens pour des loups, Rivages, 2017, 320 pages.
 

Lectures pour l'été 2017
Romans, nouvelles et récits romancés

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