Expo : 21 rue de la Boetie : Picasso, Matisse, Braque, Léger...

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Du 22 septembre 2016 au 19 février 2017, le musée de La Boverie à Liège accueille en ses murs une nouvelle exposition consacrée à la collection Paul Rosenberg, grand-père de la journaliste Anne Sinclair. Une exposition d’envergure où le visiteur peut admirer des œuvres remarquables des plus grands maîtres de l’art moderne : Pablo Picasso, Henri Matisse, Georges Braque, Marie Laurencin ou encore Fernand Léger.

 

Avant d’être la nouvelle exposition du musée de La Boverie, «21 rue La Boétie» était l’adresse de la galerie parisienne de Paul Rosenberg, célèbre marchand d’art du 20e siècle et conseiller de nombreux artistes comme Henri Matisse ou Marie Laurencin. Cette adresse est aussi le titre du récent ouvrage d’Anne Sinclair (éditions Grasset, 2012), dans lequel la journaliste décrit le parcours de son grand-père collectionneur, homme d’affaires et ami des artistes de son temps.

L’ouvrage d’Anne Sinclair est le point d’orgue de cette exposition qui retrace la vie de Paul Rosenberg et évoque un chapitre important de l’histoire de l’art de la première moitié du 20e siècle. Une histoire formidablement illustrée par une soixantaine de chefs-d’œuvre de l’art moderne, de documents issus d’archives européennes et américaines, de photographies et de correspondances.

21 rue la Boétie se définit comme une exposition d’art et de civilisation qui présente des œuvres ayant transité par les différentes galeries de Paul Rosenberg, à Paris et New York. Le collectionneur fait en effet figure de témoin de la migration du centre de gravité artistique de Paris à New York lors des bouleversements de la Seconde Guerre mondiale. Durant cette triste période, Paul Rosenberg, juif, est déchu de la nationalité française par le régime de Vichy et spolié d’un grand nombre de tableaux par les nazis, dont certains réapparaîtront quelques décennies plus tard au hasard des ventes aux enchères et de l’histoire.

Le début de l’exposition confronte le visiteur aux larges cimaises qui présentent de multiples portraits et photographies du collectionneur et de sa galerie. Cet espace introductif évoque les grandes transformations du marché de l’art au 19e siècle et le rôle des mécènes et des salons qui dominent la vie artistique et voient naître l’émergence d’une nouvelle fonction importante, celle de marchand d’art.

Paul Rosenberg 1914 Archives Paul Rosenberg NY Paul Rosenberg - Archives Paul Rosenberg NY

À gauche : Paul Rosenberg en 1914 au 21 rue de la Boetie ©Archives Paul Rosenberg New York / MoMA ©DR - À droite : Paul Rosenberg montrant un tableau de Renoir à l'écrivain Somerset Maugham ©Archives Paul Rosenberg New York / MoMA ©DR
 

L’espace suivant est consacré au « système Rosenberg », dans lequel est décrite la manière dont le collectionneur coordonne sa galerie d’art où s’enchevêtrent artistes sous contrat, clientèle bourgeoise, fixation des prix, organisation du stock, publicité et expositions d’artistes.

gauguin - La BoverieUne salle particulière est consacrée à l’ « art dégénéré », qui rappelle l’exposition organisée par l’Université de Liège à la Cité Miroir, intitulée « L’art dégénéré selon Hitler ». Là comme ici, le visiteur peut contempler plusieurs tableaux (enrte autres Gauguin, Chagall, Picasso ou encore Kokoschka) achetés par la Ville de Liège lors de la vente de Lucerne en juin 1939. Pour rappel, la notion d’ « art dégénéré » tire son origine de la théorie nazie de pureté raciale et désigne presque la totalité de la production d’art moderne (en particulier le fauvisme, le cubisme et l’expressionnisme) qui s’oppose à l’ « art germanique » issu de la tradition aryenne et correspondant à l’idéal nazi. Lors de la vente de Lucerne organisée par l’occupant allemand, neufs tableaux ont été acquis par la délégation liégeoise, qui font aujourd’hui partie des collections du musée de La Boverie.

Paul Gauguin, Le sorcier d'Hiva Oa, 1902
© MAMAC Liège. Classé trésor par la Fédération Wallonie-Bruxelles le 23/11/2010

 

L’exposition 21, rue la Boétie offre une scénographie particulièrement intéressante en ceci qu’elle confronte les tableaux dits d’ « art dégénéré » à des œuvres encensées par les nazis. La célèbre Famille Soler1 de Picasso est par exemple comparée au rendu plus classique de la Bergbauernfamilie de Rudolf Otto qui représente une famille de paysans tranquilles réunis autour d’un repas dont le réalisme tranche avec l’étrangeté des visages et l’arrière-plan abstrait du tableau de Picasso.  

 Picasso - La famille Soler Rudolf Otto

À gauche : Pablo PIcasso, La famille Soler © Succession Picasso - SABAM Belgium 2016  ©MAMAC Liège. Classé Trésor par la Fédération Wallonie-Bruxelles le 23/11/2010 - À droite : Rudolf Otto, Bergbauerfamilie (Famille de paysans de montagne), 1944 © Deutsches Historisches Museum Berlin / A. Psille

 

 

Matisse - copyright succession Matisse -SABAM Belgique L’exposition 21, rue la Boétie a un accent très biographique. Elle retrace en effet la vie de Paul Rosenberg, son exil aux États-Unis sous l’occupation allemande, la libération et la lutte pour la restitution de ses tableaux (comme la Robe bleue dans un fauteuil ocre de Matisse acheté par Rosenberg en 1937, volé par les nazis et qui se retrouvera parmi les collections d’un armateur norvégien pour être finalement restitué à la famille Rosenberg en 2014).

Henri Matisse, Robe bleue dans un fauteuil ocre, Huile sur toile, 1937
Collection privée © Succession H. Matisse - SaBAM Belgium 2016

 

Outre les œuvres du collectionneur Paul Rosenberg, l’exposition met également en exergue de nombreuses toiles d’artistes célèbres du 20e siècle, issues à la fois de collections publiques et privées. L’exposition 21, rue La Boétie, initiée par Anne Sinclair, est à la fois un hommage à son grand-père collectionneur mais aussi « passeur de modernité » qui a soutenu et exposé un grand nombre d’artistes d’avant-garde. Le célèbre Compotier et cartes de Georges Braque, Le déjeuner de Fernand Léger, Les deux espagnoles de Marie Laurencin ou encore Partition, bouteille de porto, guitare et cartes à jouer de Pablo Picasso ne sont que quelques exemples des chefs-d’œuvre privés rarement visibles et exposés aujourd’hui au musée de La Boverie.

Braque Leger

À gauche : Georges Braque, Compotier et cartes, 1913 © Service de la documentation photographique du MNAM - Centre Pompidou, MNAM-CCI/Dist. RMN-GP ©ADAGP- SABAM Belgium 2016 - À droite : Fernand Léger, Le déjeuner, 1921-22 © MOMA © SABAM Belgium 2016 - Digital Image © The Museum of Modern Art /Scala, Florence
 

 Picasso Marie Laurencin

 À gauche : Pablo Picasso, Partition, bouteille de porto, guitare et cartes à jouer, 1917-18, Huile sur toile ©Succession Picasso - SABAM Belgium 2016 / ©Photo : Collection David Nahmad, Monaco - À droite : Marie Laurencin, Les deux espagnoles, 1915, collection particulière © FondationFoujita / SABAM Belgium 2016 - Photo Christian Baraja, Studio SLB

 

 

Aurélie Garot
Septembre 2016

 

crayongris2Aurélie Garot est étudiante en Histoire de l'Art

 

Voir l'article La science au service de l’art


 

1 Ce tableau a fait l'objet d'une étude très poussée du Centre européen d'Archéométrie de l'Université de Liège

 

Exposition visible au musée de La Boverie à Liège
du 22 septembre 2016 au 29 janvier 2017.

Site internet : www.21ruelaboetie.com

 

 



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