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Lectures pour l'été 2016 - Poches - Romans français

08 juin 2016
Lectures pour l'été 2016 - Poches - Romans français

 

DuboisJean-Paul Dubois, La nouvelle vie de Paul Sneijder

S’engouffrer dans l’univers de l’auteur d’Une vie française (Prix Femina) ou de Vous plaisantez Monsieur Tanner constitue une expérience littéraire et émotionnelle forte. Le romancier met à chaque fois en scène un personnage évoluant sur la crête d’une dépression douloureusement communicative bien qu’émaillée ci et là de traits d’humour générateurs de francs éclats de rire. Peu d’écrivains font en effet cohabiter avec une telle force tristesse et drôlerie. Et de l’un et l’autre, Le cas Sneijder, son vingtième livre rebaptisé La nouvelle vie de Paul Sneijder, titre du film qui en est l’adaptation, n’en est pas avare.

Depuis que Marie, la fille de son premier mariage, est morte dans la chute d’un ascenseur d’où il a miraculeusement réchappé. Paul, qui ne s’entend plus guère avec sa deuxième femme, passe une partie de ses journées à lire des revues sur ces engins potentiellement mortels auprès de l’urne contenant les cendres de la seule personne qu’il aimait vraiment. Conscient qu’il lui faut trouver un emploi, il prend le seul qui semble lui convenir, promeneur de chiens. Il s’agit, par tous les temps, de faire faire pipi à Watson, Charlie ou Julius et, parfois, de les ramener chez leur maître. Il prend plaisir à ce travail, qui fait honte à sa femme, et sympathise avec son patron, un Chypriote amateur de nombres palindromiques. Comment le monde tourne-t-il et comment les hommes ont-ils encore la force d’y vivre, ne cesse de ressasser ce sexagénaire profondément marqué par se descente dans des enfers dont il garde pour lui la teneur exacte, refusant de révéler ce qu’il a vu avant de perdre connaissance. (Points)

 

BlasdeRoblesJean-Marie Blas de Roblès, Là où les tigres sont chez eux

Lauréat du Prix Fnac en 2008, ce roman de Jean-Marie Blas de Roblès qui a bien failli avoir le Goncourt, reparaît dans la collection poche de son éditeur originel, Zulma. Il a fallu dix ans à son auteur, lui-même archéologue, pour mener à bien ce projet extrêmement puissant et ambitieux, ample saga épique qui, par certains côtés, fait penser aux films amazoniens de Werner Herzog. Eléazard von Wogau, un journaliste perdu dans la Nordeste brésilienne, est chargé de retravailler une hagiographie d’un jésuite allemand, Athanase Kirscher, savant polyglotte très célèbre en son temps, le 17e siècle, pour sa curiosité tout azimut et ses multiples inventions et travaux, même inaboutis, même ratés (et d’ailleurs cités par Flaubert). Le récit de cette vie riche et variée est l’œuvre d’un autre jésuite qui lui témoigne une admiration absolue. Il est interrompu par plusieurs histoires contemporaines, le quotidien de son lecteur, souvent sous forme de carnets, la mission sur le fleuve Paraguay de son ex-femme archéologue, une mission qui tourne rapidement très mal, ou les voyages dans l’univers de la drogue de sa fille étudiante qui lui réclame de l’argent. Ou encore, reflets de la situation brésilienne, un politicien louche et un adolescent infirme des favelas.

Là où les tigres sont chez eux est un livre dense, aux dimensions multiples, riche en événements et péripéties contés dans une langue limpide et fluide et dans lequel on s’aventure comme dans une forêt touffue en se frayant son propre chemin. Sa lecture patiente et exigeante est néanmoins «facilitée» par sa construction éclatée, le lecteur passant, non sans une certaine délectation, d’une époque à une autre, d’un univers à un autre, d’un personnage à un autre. (Zulma Poches)

 

AssoulinePierre Assouline, Sigmaringen

Sigmaringen se situe dans le Bade-Wurtemberg, un Land du sud de l’Allemagne à quelque 170 km de la frontière française. C’est là que, sur décision d’Hitler, le gouvernement de Vichy est envoyé en septembre 1944. Il va y rester jusqu’en avril 1945. S’y réfugient également de nombreux collabos et miliciens avec leurs familles, soit quelque deux mille Français qui vont souffrir du froid et de la faim – l’hiver sera très rude. Tels Céline et sa compagne Lucette (plus leur chat Bébert) en transit vers la Suisse, imaginent-ils d’abord, finalement vers le Danemark. L’auteur de Voyage au bout de la nuit est l’un de deux seuls médecins de la ville qui s’étend en contrebas du château dont ses propriétaires, les Hohenzollern, ont été chassés et remplacés par Pétain, Laval, Doriot ou Déat qui se détestent. Le lieu jouit d’un statut d’extraterritorialité et accueille les ambassadeurs d’Allemagne (Otto Abetz), du Japon et d’Italie. Et il est également occupé par la gestapo. Se considérant prisonnier, le vieux maréchal boude, n’adressant plus la parole à personne. Et les autres veulent tous prendre la main sur ce «gouvernement en exil» pompeusement intitulé Commission gouvernementale française pour la défense des intérêts nationaux et présidé par l’ancien journaliste Fernand de Brinon. Dans l’espoir de récupérer les rênes de la France, ce que l’offensive des Ardennes peut un temps laisser espérer. À défaut, ils seront malgré eux des otages de luxe.

Pour raconter l’histoire de cette «tragi-comédie bouffonne sur fond d’apocalypse», Pierre Assouline, auteur de nombreuses biographies (Jardin, Simenon, Gallimard, Hergé) traversant cette époque, a choisi le biais romanesque. Son narrateur, Julius Stein, est le majordome imaginaire de la famille Hohenzollern resté sur place. Il est chargé de veiller qu’à leur retour, ses maîtres retrouvent les lieux comme ils les ont laissés. Parfaitement francophone, il se lie d’amitié avec Mlle Wolfermann, la gouvernante de Pétain. S’ils ne dit pas grand-chose, tendant à passer inaperçu, il a des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. Il est donc le témoin privilégié de ce monde qui s’écroule inexorablement. (Folio)

 

FoenkinosDavid Foenkinos, Charlotte

L’auteur de La Délicatesse a surpris en publiant à la rentrée 2014 ce roman biographique plus grave, dépourvu de l’humour qui lui était coutumier et écrit à la manière d’un long poème en prose. L’existence de l’artiste peintre Charlotte Salomon, née en 1917 à Berlin, morte à Auschwitz vingt-six ans plus tard, est un constant face-à-face avec la mort. Le suicide de sa mère quand elle a huit ans (mais qui ne lui sera révélé que longtemps après) est «l’aboutissement d’une longue lignée suicidaire», pas moins de huit membres de sa famille maternelle s’étant en effet donné la mort, dont sa tante qui portait le même prénom qu’elle et jusque sa grand-mère au début de la guerre. Son père, médecin, se remarie avec une cantatrice qu’elle adore, mais les lois antijuives les empêchent, lui de soigner, elle de chanter. Et bientôt Charlotte est exclue de l’Académie des Beaux-Arts où elle a remporté le premier prix… qui ne lui a pas été attribué. Tout la pousse donc à partir, si ce n’est l’amour qu’elle porte pour le professeur de chant de sa belle-mère, un personnage torturé, insaisissable. Elle rejoint finalement Nice où ses grands-parents sont hébergés par une Américaine riche et veuve d’origine allemande, Ottilie Moore. Obligée de se signaler, d’abord comme Allemande, puis comme Juive, elle sera enfermée au camp du Gurs et échappera de peu à une première déportation.

Dans son roman, Foenkinos confie que la découverte de cet univers pictural lui a donné «le sentiment d’avoir enfin trouvé ce qu’[il cherchait]». Il relate ses visites à Charlottenburg, le quartier où a vécu Charlotte, dans l’école qu’elle a fréquenté, à hôtel de Saint-Jean-Cap-Ferrat où, pendant presque deux ans, elle a peint et écrit. Il rencontre aussi la fille du médecin qui l’a soignée et à qui elle a confié une valise contenant plus d’un millier de gouaches ainsi que son livre autobiographique Vie? ou Théâtre? (réédité il y a quelques mois), Ottilie étant retournée aux États-Unis. En lui disant: «C’est toute ma vie». (Folio)

 

 

BofaneIn Koli Jean Bofane, Congo Inc.

Récemment couronné par le prix des Cinq continents de la francophonie, Congo Inc., sous-titré «Le Testament de Bismarck», est un roman formidablement subtil et intelligent, d’un humour particulièrement noir. Un pygmée nommé Isookanga  quitte son village pour Kinshasa avec l’ordinateur dérobé à une africaniste belge venue enquêter sur sa communauté (et particulièrement intéressée pas lui) et sur lequel il a appris à jouer en ligne. Logeant parmi les enfants des rues, ce «mondialiste» convaincu s’associe avec un Chinois pour vendre une eau soi-disant suisse. Il est contacté par un ancien rebelle qui, pour «venger» le génocide rwandais, a massacré des villages entiers au Kivu et s’est livré à des trafics d’armes avec un officier de l’ONU, avant de devenir ministre en RDC. À travers son héros ingénieux et volontaire et cet individu sans scrupules, l’auteur congolais (de la RDC), qui vit à Bruxelles, se livre à une terrifiante plongée dans cette région du monde en proie aux pires dérives. (Babel)

 

MukasongaScholastique Mukasonga, La vache du roi Musinga

Ces trois nouvelles sont extraites de Ce que murmurent les collines, un recueil paru en 2014 à travers lesquelles l'écrivaine rwandaise installée en France fait revivre la culture de son pays natal (et qui possèdent chacune en guise de postface des «notes à l'attention du lecteur curieux»). Dans celle qui donne son titre au livre, il est question d’une rivalité entre le roi Musinga, qui affirme que le Rwanda lui appartient, et les autorités belges qui, vantant leur apport civilisationnel, veulent le faire venir à Kigali, «leur» capitale. Le bois de la croix, à travers une cordelette à laquelle est accroché un bout de bois et dont une étudiante en sociologie, même nue, ne se sépare pas, raconte la cohabitation entre les croyances et légendes vernaculaires et les rites religieux importés par les pères chrétiens. Le héros d’Un pygmée à l’école, enfin, un pygmée (Cyprien le Mutwa) envoyé par un missionnaire dans une école où il devient le meilleur élève, révèle le rejet dont sont victimes ces «parias» de la part des Rwandais. (Folio 2€)

 

DelperdangePatrick Delperdange, Chants de gorges

Réédition chez Espace Nord d’un ancien roman de l’auteur belge de romans noirs Patrick Delperdange, couronné en 2005 par le prix Rossel. Il est avant tout question d’écriture dans ce récit en sept chants. Car ses six principaux personnages, qui prennent alternativement la parole, existent davantage par ce qu’ils disent que par ce qu’ils font. Un garçon, qui ne connaît ni son âge, ni son prénom – il est simplement «le fils de Marie» –, fuit son village «noir et pourri» suite au meurtre du curé dont il est accusé. Il s’en défend, se souvenant seulement que le saint homme, à qui il était venu demander du travail, voulait faire «des saletés» avec lui. Dans son parcours à la fois violent et spirituel, cet enfant silencieux, innocent, croise un responsable de chantier, le chef d’une famille gitane ou des êtres paumés, perdus. Sur chacun d’eux, il exerce une fascination aussi puissante qu’inexplicable.

La magie du livre de Delperdange est de créer un univers impalpable, indéfinissable. Où sommes-nous ? Dans le réel ou dans l’imaginaire ? Dans notre monde ou dans un autre fantasmé ? Son écriture, très forte, emprisonne le lecteur dans les mêmes filets que ceux qui retiennent ses ombres, ne cessant de le déstabiliser, de provoquer chez lui ce sentiment de dépaysement que seule engendre la grande littérature. Ce Chants des gorges est un livre hors du commun dont on ne se libère pas aisément. (Espace Nord)

 

LahensYanick Lahens, Bain de lune

Un an après la Franco-camerounaise Leonora Miano, c’est une autre romancière issue de la francophonie, Yanick Lahens, que les dames du Femina ont couronné en 2014. Pour un très beau livre, Bain de lune, publié chez une «petite» éditrice, Sabine Wespieser. Rythmée par la voix d’une jeune naufragée qui remonte le fil de son existence, l’histoire contée est celle de deux familles du village haïtien d’Anse Bleue liées par un mélange d’amour et de rivalités depuis la rencontre de Tertulien Mésidor et d’Olmène Lafleur. Ce récit est aussi celui d’une île douloureusement marquée par les dictatures successives des Duvalier père et fils, et leurs tristement fameux Tonton Macoutes, puis par la présidence contestée de Jean-Baptiste Aristide. Bain de Lune est enfin le portrait d’une communauté où la vie est dure, surtout pour les femmes éternellement soumises aux hommes. (Points)

 

JacquesPaula Jacques, Au moins il ne pleut pas

En 1959, deux orphelins venus d’Égypte, Solly, 14 ans, et Lola, 15 ans, débarquent à Haïfa. Craignant d’être séparés par l’Agence juive qui a financé leur voyage, ils se réfugient chez Magda et Ruthie dont la maison ayant appartenu à un juge de religion musulmane est la plus belle de Wadi Salib. Dans ce quartier où se sont progressivement regroupés les juifs pauvres d’Afrique du Nord, la splendeur passée se laisse encore deviner sous son aspect délabré. Tandis que l’adolescente rêveuse suit des cours d’hébreu, son frère se livre à de fructueux trafics avec Georgie, le neveu de Magda. Née en France – pays qu’elle déteste pour l’avoir obligée de porter l’étoile jaune avant de la déporter -, Magda est arrivée en Israël en 1947. C’est une femme chaleureuse et accueillante, débordante d’humanité. Ruthie, quant à elle, Belge issue du «grand monde» et auteure de poèmes, est tout son contraire: peu amicale, méprisante, «froide comme un poisson en gelée». Elles étaient toutes deux détenues au camp de Ravensbrück et si Ruthie a survécu, c’est grâce à son aînée qui a réussi à la «caser» comme secrétaire de bureau. Cette réalité, Lola, totalement ignorante des crimes nazis, la découvre progressivement. Tout comme elle apprend l’existence de kapos, ces déportés choisis pour faire régner l’ordre, parfois pires que les gardiens eux-mêmes. Cette accusation est portée sur Magda, reconnue au marché et interrogée par la police. Mais qui nie farouchement.

Pour écrire ce roman, Paula Jacques s’est partiellement inspirée de son vécu. Née en 1949 au Caire d’où elle a été chassée par la révolution nassérienne, elle s’est retrouvée à la fin des années 1950 en Israël, immédiatement séparée de son frère par l’Agence juive. Mais elle y est peu restée, gagnant bientôt le France qu’elle considère comme sa vraie patrie. Elle est aujourd’hui journaliste sur France Inter où elle présente l’émission Cosmopolitaine le dimanche après-midi. (Folio)

 

Tong-CuongValérie Tong-Cuong, Pardonnable, impardonnable

Après L’Atelier des miracles (J’ai lu), un magnifique roman construit autour du thème de l’entraide, Pardonnable, impardonnable s’attache au pardon. Comment, une fois la colère puis la haine dépassées, la vengeance et l’amertume vaincues, vient le temps du pardon ? Une question éminemment actuelle que l’auteure déploie autour d’une cellule familiale infectée par les non-dits.

Un jour d’été sur une route de campagne. Milo, 12 ans, censé réviser avec sa jeune tante, Marguerite, fait une chute de vélo. Il est plongé dans le coma, les médecins sont d’un optimisme mesuré. Ce drame provoque une crise familiale. Lino, le père, issu d’une famille ouvrière qui l’a rejeté, sans pour autant être accepté par sa belle-mère, se culpabilise de s’être toujours montré très exigeant envers son fils afin de le voir arriver «au sommet de la pyramide», oubliant de lui dire son amour. Il condamne sans jugement sa belle-sœur avec qui il est lié par un terrible secret. Céleste, la mère, voit remonter en elle une douleur ancienne, la perte d’un enfant mort-né. Quant à Jeanne, l’intransigeante grand-mère, divorcée, elle se montre de plus en plus envahissante auprès de sa fille chérie tout en étant confortée dans son désamour assumé pour sa cadette.

Ces quatre êtres ravagés par le chagrin prennent alternativement la parole, comme dans les deux romans précédents de Valérie Tong Cuong, Providence et L’Atelier des miracles. Leurs périples intérieurs sont merveilleusement retracés, Lino, Céleste, Marguerite et Jeanne fournissant petit à petit les pièces d’un puzzle qui ne sera dévoilé qu’en toute fin du livre. Un livre porteur d’une charge émotionnelle tout à fait sidérante qui naît de la richesse humaine dont sont dotés tous les personnages, même ceux qui, a priori, en sont le moins pourvus. Car, à défaut de justifier ou même d’excuser tel acte, tel comportement, le lecteur est amené à le comprendre. Et dès lors à ne plus condamner d’emblée quelqu’un dont le comportement lui semble blâmable. À réviser son jugement. Ce qui, au final, constitue une admirable leçon de vie. (J’ai lu)

 

AzzedineSaphia Azzeddine, Bilqiss

Bilqiss est en prison. Femme dans un pays (non cité) où il vaut mieux «être n’importe quoi d’autre, et si possible un volatile», elle est menacée de lapidation. Son crime ? Être libre et indépendante. Elle refuse de se conformer à cette société muselée où la musique et la poésie sont interdites, où les bibliothèques et les écoles sont brûlées, où les femmes n’ont pas le droit d’acheter des légumes de forme phallique. Un expert en droit islamique l’accuse d’une vingtaine d’infractions : porter des chaussures à talons, posséder un recueil de poésie persane, une peluche, des collants, une pince à épiler… Mais sa faute suprême est d’avoir remplacé le muezzin un matin où, ayant «englouti» des hectolitres d’arak, il était incapable d’atteindre le sommet du minaret. Tout en rappelant que «la prière est meilleure que le sommeil», elle a, dans son discours, félicité publiquement certains habitants – le boulanger, le jardinier, le maraîcher et le professeur – de vaquer à leurs bénéfiques occupations au lieu de prier. Scandale !

Son procès, qui aurait dû être promptement réglé, traîne en longueur. Le juge, qui fut un jeune homme gai et insouciant avant de devenir un accusateur impitoyable et craint, ne cesse en effet, sous les huées d’une assistance vindicative, de reporter son verdict au lendemain – un peu comme dans Les Mille et une nuits. Car il voudrait sauver celle qui fut la confidente de sa femme à la fin de sa vie. Chaque soir, il se rend dans sa cellule pour la convaincre de faire amende honorable. Mais, parce qu’elle préfère mourir que vivre dans ces conditions, elle refuse obstinément. Mais si Bilqiss s’insurge avec une telle force contre une société qu’elle juge mortifère, ce n’est pas du tout par athéisme. Elle en est convaincue, «il n’y a Dieu qu’Allah» et à Lui seul elle doit rendre compte. En voulant la condamner, ses juges s’arrogent donc un droit qui relève de l’«imposture». Dans ce monde obscurantiste et totalitaire dont l’actualité se fait quotidiennement l’écho, les États-Unis sont doublement présents. Par le biais de deux soldats violemment antimusulmans qui ont pris Bilqiss en affection et tiennent grâce aux psychotropes et à l’alcool. Et sous l’aspect d’une journaliste idéaliste mais farcie de préjugés alertée par ce procès au retentissement international. Et qui se rend compte que sa générosité ne suffit pas à vaincre l’hostilité d’un peuple à l’égard des Occidentaux et de leurs bons sentiments. (J’ai lu)

 

ParisGilles Paris, L’été des lucioles

«J’ai deux mamans et un papa qui ne veut pas grandir.» Par cette phrase, Victor, 9 ans, entame le récit de ses vacances estivales. Un été qu’il a passé, comme les années précédentes, à Roquebrune-Cap Martin, non loin de Nice, avec sa mère, sa sœur aînée et sa «seconde maman», une peintre argentine. Sa vraie maman a en effet fini par quitter son père, lassée de son immaturité. Dans la résidence, Victor s’est fait deux amis, Gaspard et Justine, auxquels sont venus s’adjoindre deux jumeaux de son âge habitant les environs, Tom et Nathan.

Débutant comme un charmant roman d’enfance, L’Été des lucioles prend progressivement une tonalité plus grave et acquiert un caractère mystérieux. Qui sont réellement ces deux jumeaux qui possèdent les clés des splendides villas bordant le chemin des douaniers? Et pourquoi le père du narrateur n’a-t-il jamais voulu accompagner sa famille dans cet appartement hérité de sa propre sœur alors qu’il y est venu petit, comme le prouve une photo ancienne? Ces deux énigmes sont intimement liées et c’est une baronne octogénaire, malmenée par la vie, qui va conduire le jeune détective vers leur résolution.

Ce roman est le quatrième publié par Gilles Paris depuis plus de vingt ans, après Papa et maman sont mort, L’autobiographie d’une courgette (dont l’adaptation en film d’animation a été dernièrement présentée à Cannes) et Au pays des kangourous. Abordant à chaque fois des sujets importants de la vie quotidienne (la mort, la dépression, les conflits parentaux, l’homosexualité) à travers les yeux d’un enfant de 9 ans, l’écrivain trouve toujours le ton juste, entre gravité et légèreté. Ces livres se singularisent aussi par leur dimension merveilleuse, onirique. (J’ai lu)

 

AdamOlivier Adam, Peine perdue

Peine perdue est le fruit d’un vrai travail d’écriture sur une matière romanesque peu traitée en littérature, le vécu d’hommes et de femmes qui, quotidiennement, se battent pour sauver leur travail, pour se faire une (petite) place dans la société, pour garder la tête hors de l’eau et permettre à leur vie de conserver une certaine dignité. Le décor assez sinistre est une cité balnéaire de la côte d’Azur entre Marseille et Nice, mais hors-saison. Le point de départ est le passage à tabac d’Antoine, un joueur de foot du club local engagé pour retaper des mobil-homes. L’intrigue progresse en se focalisant alternativement sur une vingtaine de personnages plus ou moins concernés par ce drame, au moment où une tempête ravage les hôtels et campings et voit la mer engloutir quelques corps et en rejeter un autre. C’est passionnant de bout en bout, formidablement écrit, terriblement humain, le lecteur est happé par ces individus aux contours complexes dont l’auteur de Je vais bien, ne t’en fais pas ou Le Cœur régulier (récemment adapté au cinéma) suit les méandres existentiels pour mieux faire émerger leur nature profonde. (J’ai Lu)

 

BoscAdrien Bosc, Constellation

Le premier roman d’Adrien Bosc, qui publie des revues littéraire et sportive, a reçu le Prix de la Vocation avant d’être présent sur les listes du Goncourt et du Renaudot en 2014. Son titre, Constellation, désigne l’avion qui, parti d’Orly dans la soirée du 27 octobre 1949 en direction de New-York, s’est écrasé dans l’Archipel des Açores. À son bord se trouvent deux «stars», Marcel Cerdan, réclamé par Édith Piaf qui l’a fait revenir par les airs plutôt que par la mer, et la violoniste Ginette Neveu, dont on retrouvera un morceau de l’un des deux instruments. Le premier va tenter de récupérer son titre mondial détenu par Jack La Motta, le second se lance à la conquête de l’Amérique. L’auteur raconte l’erreur d’orientation de l’avion, qui percute le Mont Redondo tout proche de l’île de Santa Maria où il doit se ravitailler, et les recherches menées ensuite. Tout en présentant quelques-uns parmi les 48 passagers et membres d’équipage morts dans l’accident : le peintre mondain Bernard Boutet de Monvel, Amélie Ringler, une ouvrière alsacienne venue rejoindre sa riche tante, cinq bergers basques s’en allant faire fortune outre-Atlantique, Kay Kamen, responsable du marchandising de Walt Disney, etc. (Le Livre de Poche)

 

DevillePatrick Deville, Viva

Primé en 2012 par la FNAC et le Femina, Peste & Choléra, la vie d’Alexandre Yersin, l’inventeur du vaccin contre la peste, a révélé son discret auteur à un plus large public. Pourtant, Patrick Deville était déjà l’auteur d’une dizaine de romans dont trois d’«aventures», Pura Vida, Equatoria et Kampuchéa, réunis en un volume sous le titre Sic transit (Seuil). À William Walker en Amérique centrale, à Brazza en Afrique et à Henri Mouhot découvrant les temples d’Angkor vient aujourd’hui s’ajouter Trotsky. Dans Viva, le compagnon de lutte de Lénine condamné à mort par Staline débarque en 1937 à Tampico, un port du Mexique où, après une décennie d’errance, il a reçu l’asile politique. Il est hébergé par les peintres Diego Rivera et Frida Kahlo avec qui il a une liaison passionnée. Il sera assassiné trois ans plus tard par Ramon Mercader. D’une plume travaillée, l’auteur élargit sa focale en s’intéressant au passé du révolutionnaire russe, aux écrivains français de passage (Antonin Arthaud, André Breton) et, surtout, à Malcolm Lowry qui y entame son œuvre majeure, Au-dessous du volcan. Tout en se mettant lui-même en scène sur la piste de ces ombres anciennes, du Mexique à la Sibérie. (Points)

 

BeleziMathieu Belezi, Un faux pas dans la vie d’Emma Picard

Lorsqu’elle pose le pied à Mercier-le-Duc, un village «tout neuf» bâti entre Alger et Sid Bel Abbès, Emma en est convaincue : une belle vie l’attend. À cette mère de quatre garçons, dont le dernier, Léon, a six ans, l’État français a offert vingt hectares de terres en Algérie, «pour la faire sortir du trou» dans lequel elle se débat depuis la mort de son mari. Nous sommes à la fin des années 1860 et la France encourage le peuplement de ses départements. Mais la ferme se situe à plusieurs heures de marche du village et le seul puits est à sec pendant les mois d’été. Aidée par «son Arabe», Mekika, ainsi que par ses aînés, les plus petits allant à l’école à Mercier, elle va tenter de faire vivre sa terre et ses quelques animaux – poules, lapins, vaches –, malgré la chaleur estivale, les rigueurs hivernales et les sauterelles qui dévorent tout sur leur passage. Mais son agriculture européenne, trop intensive, ne correspond pas au climat et elle échoue. Et pourtant, elle s’obstine, sourde à la demande pressante de Jules, un révolutionnaire parisien devenu son amant, de le suivre à Alger.

Après Notre terre et Les Vieux Fous, Mathieu Belezi referme avec ce roman remarquable sa trilogie algérienne. En modifiant son point de vue puisqu’il s’intéresse ici non plus aux riches colons mais aux victimes de l’engouement colonisateur. C’est un texte de Maupassant, Au soleil, dans lequel l’auteur du Horla croise une Alsacienne victime de ce leurre qui a coûté la vie à ses enfants en la plongeant dans la misère, qui a servi de terreau à son roman. Pour conter cette lente descente en enfer, le romancier adopte une forme originale. Le récit d’Emma, un long souffle sans point, avec de fréquents retours à la ligne, est régulièrement rompu par des adresses à son fils en train de mourir, laissant ainsi présager l’issue finale de ce combat perdu d’avance. (Le Livre de Poche)

 

DelacourtGrégoire Delacourt, Les quatre saisons de l’été

Le cinquième roman de l’auteur à succès de La Liste de mes envies est divisé en quatre parties qui portent chacune le nom d’une fleur – Pimprenelle, Eugénie Guinoisseau, Jacinthe, Rose – et dont les héros affichent des âges différents À 15 ans, Louis rêve d’aimer toujours sa voisine de 13 ans, Victoire, quitte à être très patient. Une femme de 35 ans, mère d’un enfant de 9 ans et dont le mari s’est «envolé», retrouve «l’amour fou de [ses] quinze ans» dans l’hôpital où a été hospitalisé le vieil homme qu’elle a sauvé de la noyade. À 55 ans, chagrine que son mari «ne la regarde plus», Monique veut désormais s’appeler Louise pour se donner l’impression de pouvoir revivre sous les traits d’une autre femme. Et, à 75 ans, après un demi-siècle de bonheur partagé, Rose et Pierre, qui se sont promis de s’aimer toujours sous le fracas des bombes, ont le sentiment d’avoir atteint le bout de leur route.

Ces quatre histoires se déroulent en un même lieu – dans la station balnéaire du Touquet – et à une même époque, l’été 1999, quelques mois avant le bug annoncé de l’an 2000. L’un des tubes de cet été est Hors-saison, la chanson de Francis Cabrel qui traverse le roman parmi d’autres porteuses d’émotions en lien avec celles que vivent les personnages. (Le Livre de Poche)

 

TeuléJean-Teulé, Héloïse, ouille !

«Où est la très sage Hélloïs, /Pour qui chastré fut et puis moyne /Pierre Esbaillart à Saint Denis? / Pour son amour eut ceste essoyne.» En écrivant en 2006 Je, François Villon, Jean Teulé a croisé une première fois Héloïse et Abélard mis en vers par le poète médiéval dans la Ballade des Dames du temps jadis dont Georges Brassens a fait l’une de ses plus fameuses chansons. Et il y a repensé huit ans plus tard. Pendant six mois, il a lu les livres – «très sérieux» – consacrés à leur histoire ainsi que leur correspondance (publiée en Folio). Le résultat est un roman fort drôle malgré sa dimension tragique, qui mêle avec bonheur des expressions et mots d’époque à un parler contemporain.

Abélard a 38 ans, Héloïse 18, lorsqu’ils se rencontrent en 1118. Le premier, un philosophe qui se verrait bien archevêque ou pape, est engagé comme précepteur de la seconde par l’oncle de celle-ci, un chanoine haut-placé. Qui a la malencontreuse idée de les loger dans deux chambres attenantes reliées par une porte. Autant dire, comme le remarquera la servante, que les draps du savant ne devront guère être changés. Quant à ceux de la demoiselle… C’est d’ailleurs la chambre elle-même que l’infortuné tonton va retrouver, hélas bien trop tard, dans un état déplorable. Cette période de presque deux ans, dont les biographes se débarrassent en une ligne en parlant «d’amours torrides», l’auteur du Magasin des suicides la développe en une centaine de pages, s’appuyant sur le récit qu’en a fait Abélard lui-même dans sa «Lettre de consolation à un ami».

Les amants sont l’un et l’autre extrêmement modernes. Abélard est considéré comme le plus important philosophe de son époque, des jeunes de toute l’Europe viennent l'écouter. À rebours de son temps, il cherche la logique de Dieu et pense que la religion catholique doit évoluer. Après son émasculation (qui vaudra la pareille à ses tourmenteurs, en plus d’avoir les yeux crevés), attaqué pour ses livres, il est d’abord emprisonné avant de se réfugier à l’abbaye de Saint-Denis. Où il conteste l’identité de ce Denis. On le retrouve ensuite en Champagne puis en Bretagne. Héloïse est peut-être, quant à elle, la première féministe de l’histoire. Elle veut faire des études, refuse d’abord d’épouser son amant afin de «rester libre» et finit par se sacrifier pour lui en entrant au couvent. Dont elle finira mère supérieure, tout en ne croyant pas en Dieu. C’est pourquoi elle refuse de donner à son fils un prénom chrétien, lui préférant celui d’Astrolabe, le nom d’un instrument d’astronomie.

Les deux anciens amoureux finissent pourtant par diverger, comme en témoignent les quelques lettres qu’ils s’échangeront. Si Héloïse reste éprise de celui qu’elle a tant aimé, continuant à lui parler abondamment de sexe, ce n’est pas son cas à lui. Devenu très pieux, convaincu d’avoir été puni par où il a péché, Abélard se dit soulagé que le Seigneur ait fini par les «délivrer» de leurs «débauches incroyables». Ils mourront au même âge – 63 ans –, à vingt ans d’intervalle. Et lorsqu’Héloïse sera déposée dans le caveau, les ossements de son amant se refermeront sur elle, l’enlaçant une dernière fois. (Pocket)

 

ModianoPatrick Modiano, Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier

Patrick Modiano affectionne l’automne, saison entre chien et loup, mélange de clarté et de pénombre. Ce roman aurait plus s’appeler Du plus loin de l’oubli s’il n’avait déjà eu lui-même recours à ce titre. S’y trouvent entremêlées plusieurs époques diversement lointaines qui toutes ont l’automne pour cadre. Comme dans l’un de ses plus beaux romans, Dora Bruder, le «héros» mène une enquête, mais dans son propre passé. Le point de départ en est un nom, Guy Torstel, figurant dans son carnet retrouvé par un certain Gilles Ottolini qui habite square Graivisaudan où, par une étrange coïncidence, il a lui-même vécu autour de ses 20 ans. Cet individu trouble, accompagné d’une intrigante jeune femme, écrit un article sur un fait divers ancien dans lequel apparaît le nom de sa mère. Ainsi que d’autres patronymes – Perrin de Lara, Bob Bugnan et surtout Annie Astrand – qui renvoient Jean Daragane à «une période de sa vie qui avait fini par lui apparaître derrière une glace dépolie», laissant «filtrer une vague clarté, mais on ne distinguait pas les visages, ni même les silhouettes». Un roman à nouveau douillettement mélancolique. (Folio)

 

EmmanuelFrançois Emmanuel, Le Sommeil de Grâce, Le tueur mélancolique et La Passion Savinsen

Dans Regarde la vague (roman paru en 2007), les frères et sœurs Fougerey se retrouvaient pour le mariage de l’un d’eux dans la demeure familiale normande à la veille de sa mise en vente. Huit ans plus tard, la maison n’est toujours pas vendue et les voilà à nouveau réunis, sous la neige, à l’occasion d’un événement autrement dramatique : le coma dans lequel est tombée Grâce suite à un accident de voiture. Le Sommeil de Grâce raconte deux jours et deux nuits au cours desquels ceux qui restent vont tenter de vivre malgré la menace d’un possible silence éternel. Les deux sœurs de l’endormie, Alexia, aimantée par Milan, son amant insaisissable, et Marina, qui, à la lecture de son journal personnel, sent que lui échappe Hyacinthe, sa fille adolescente. Ainsi que son frère adoptif indien, Jivan, accompagné de sa compagne russe et de la fille de celle-ci.

Glissant d’un personnage à un autre, d’une pensée à une autre (chez Emmanuel, les dialogues s’inscrivent dans le cours du texte, les seuls retours à la ligne sont théâtralisés dans quelques scènes autonomes), le roman reste constamment en suspension sur une crête émotionnelle que seul un minutieux travail littéraire est à même de traduire avec une telle justesse. On peut s’arrêter sur chaque phrase pour la laisser pénétrer en soi tant elle est porteuse de bien autre chose que de ce qu’elle dit. Est-ce parce que l’écrivain est psychanalyste qu’il parvient à universaliser à ce point des ressentis individuels? Ce roman, dont les personnages sont bien réels, faits de chair et de vie, qui aiment (également physiquement) et se déchirent, se lit ainsi presque comme un essai philosophique tant ce qui est murmuré, ou crié, nous offre un regard neuf sur notre propre vie. On se demande, dans cette écriture à ce point ciselée, ce qui, chez son auteur, relève de l’intentionnel, de réfléchi, du délibéré, et de l’inconscient, issu de cette région intérieure impalpable d’où naît la poésie. (Points)

Emmanuel2 Emmanuel3De François Emmanuel, la collection Espace Nord réédite deux romans nettement plus anciens. La Passion Savinsen (Prix Rossel 1998) met en scène une folle passion amoureuse sur fond de grande demeure ardennaise occupée par les Allemands l’automne 1941. Comme l’écrit Estelle Mathey dans sa postface, «le silence donne forme à une parole fragmentée et à une mémoire fragmentaire que l’héroïne tente de rassembler. Le roman est tout entier parcouru de signifiants isolés qui participent au mécanisme de refoulement, au non-dit et au mutisme ambiant.»  Publié trois ans plus tôt, Le tueur mélancolique est également un roman initiatique, mais d’un tout autre ordre. Son héros, employé dans une agence de détectives, est chargé d’éliminer un sans-abri. Mais une relation fraternelle naît entre les deux hommes et le roman devient ainsi un double voyage, à la fois humain et géographique au cœur d’une ville du Nouveau Monde alternant gratte-ciels et égouts. (Espace Nord)

 

deRecondoLéonor de Récondo, Amours

Nous sommes quelques années avant la Première Guerre mondiale dans le Cher, en plein centre de la France. Anselme de Boisvaillant, notaire, et sa seconde femme, Victoire, ont à leur service Huguette et Pierre, qui ont connu Anselme enfant, et Céleste, une petite bonne que Monsieur culbute lorsque l’envie devient trop pressante – il fait en effet chambre à part avec sa femme qui refuse quasiment tout contact physique avec lui, profondément dégoûtée par ce qu’elle nomme un «enchevêtrement immonde». Résultat: après cinq ans de mariage, elle n’est toujours pas enceinte, ce qui rend de moins en moins cordiale l’attitude de la belle-maman qui s’inquiète que «ça fonctionne bien». Celle qui va sauver la jeune femme des rares assauts nocturnes de son époux, de son image publique et de tout le reste, notamment de l’ennui (elle se délecte à suivre la «dépravation» d’Emma Bovary, «un ramassis de merde» selon Anselme), c’est Céleste bientôt grosse des œuvres de son amant épisodique. Puisqu’il est trop tard pour avorter, Victoire fera passer l’enfant pour le sien, et tout le monde sera content, y compris le notaire qui, démasqué, s’en tire avec un héritier.

C’est dans son écriture, très pure, très travaillée, que ce quatrième livre de Léonor de Récondo tire sa beauté et sa densité émotionnelle. Son calme apparent dissimule un flot de cris étouffés et de violence contenue, et c’est cette opposition entre un ton presque neutre, mais non dépourvu de sensibilité, et des sentiments écorchés, voire violents, qui fait de cet Amours un objet singulier et fragile, dans la lignée de ce que publie depuis plus de dix ans son éditrice, Sabine Wespieser. (Points)

 

NohantGaëlle Nohant, La Part des flammes

Né en 1885, le Bazar de la Charité rassemble des œuvres de bienfaisance organisées par des aristocrates parisiennes où l’on vend des objets et des vêtements en faveur des pauvres. En 1897, il déménage dans un hangar en bois de 80 mètres de long bordé de part et d’autre par vingt-deux comptoirs. Les places sont chères, les dames patronnesses considérant cette manifestation annuelle comme la juste récompense de leur temps consacré aux plus démunis et aux malades. Notamment auprès des très contagieux tuberculeux enfermés dans des sanatoriums en plein Paris. L’un de ces comptoirs, celui des noviciats dominicains, est tenu par la joviale et généreuse duchesse de Bavière, sœur de l’impératrice Sissi, devenue duchesse d’Alençon suite à son mariage avec le petit-fils du roi Louis-Philippe.

C’est vers 16h30, le mardi 4 mai, peu après la bénédiction par le nonce apostolique, que le feu se déclenche dans le local mitoyen où est installé le cinématographe projetant des films des frères Lumière. Rapidement, un rideau s’enflamme. Une rumeur dira que les hommes se fraient un passage avec leurs cannes, n’hésitant à piétiner les femmes, majoritaires en ce lieu. Tandis que certaines d’entre elles tentent de s’extraire du brasier par la porte à double battants qui donne sur la rue, d’autres se réfugient dans la cour intérieur fermée par l’Hôtel du Palais. D’où, brisant les barreaux d’une fenêtre, le personnel tente d’extraire les malheureuses.

On dénombrera plus de cent-vingt victimes, dont la duchesse d’Alençon. Mais pas les deux femmes qu’elle avait invitées à son comptoir, les héroïnes – fictives – du roman, Violaine de Raezal et la jeune Constance d’Estingel. La première, qui se languit depuis la mort de son mari, rejetée par les enfants que celui-ci a eus d’un premier lit, «brûle du désir de [se] consacrer à des œuvres de charité.». La seconde, sur les conseils de la mère dominicaine chez qui elle a été pensionnaire, vient de rompre avec son fiancé, Laszlo de Nérac. Mais l’infortuné délaissé, convaincu de la réciprocité de son amour, veut à tout prix la faire changer d’avis. Or, cet apprenti écrivain est accusé d’avoir trahi sa caste en signant des articles favorables à la Commune de Paris qui a secoué la capitale un quart de siècle plus tôt. C’est comme journaliste pour Le Matin qu’il se retrouve sur les lieux de la tragédie. Si Violaine se remet rapidement de ses brûlures, ce n’est pas le cas de Constance en proie à des crises qui conduisent sa mère, qu’elle déteste, à la faire interner dans un institut psychiatrique situé non loin de la célèbre clinique du Docteur Blanche.

Autour d’un drame et d’une époque admirablement reconstruits, Gaëlle Nohant crée une intrigue d’une grande puissance dramatique et émotionnelle. (Le Livre de Poche)

 

DidierlaurentJean-Paul Didierlaurent, Le liseur du 6h27

Ce Liseur du 6h27 est un premier roman tout à fait enthousiasmant remarqué lors de sa sortie en 2014. Pour tromper la tristesse de voir des milliers de livres envoyés quotidiennement au pilon, son héros sauve régulièrement de l’impitoyable broyeuse, la Zerstor 500, des feuillets qu’il lit aux passagers partageant la voiture de son RER matutinal. Autant de morceaux d’histoires volées au temps qui passe, sans débuts, ni fins, avant ni après. Il est si convaincant que deux vieilles dames lui proposent de venir lire dans leur résidence. Guylain a deux compagnons, son poisson rouge et l’un de ses anciens collègues dont les jambes ont été broyées par la «Chose» et qui recherche depuis, avec l’appui des bouquinistes parisiens, les 1299 exemplaires d’un certain livre de jardinage. À ce mystère, vient s’en ajouter un autre, celui d’une clé USB retrouvée sous son siège par le conteur. Elle contient les extraits d’un journal tenu par une Madame Pipi qui ne laisse pas de marbre son indiscret lecteur. À qui il ne reste plus qu’à retrouver son auteur dans l’un des multiples centres commerciaux bâtis autour de Paris. (Folio)

 

CartonVirginie Carton, La blancheur qu’on croyait éternelle

Dans le premier roman de Virginie Carton, Des amours dérisoires, l’un des personnages apercevait Julien Clerc en rue. Dans celui-ci, c’est Alain Souchon que l’on voit en maillot de bain sur une plage de la côte d’Azur. D’ailleurs, son titre, La blancheur qu’on croyait éternelle, est extrait de L’Amour à la machine, une chanson de 1994. La chanson française, qui forge notre imaginaire culturel, mais aussi émotionnel, constitue la matrice de cette histoire. D’un côté Lucien, pédiatre, terriblement old school dans ses goûts – d’intérieur notamment. De l’autre Mathilde, vendeuse de chocolats sortie d’une grande école de commerce, qui désespère sa mère qui la voudrait plus «rigolote» et ambitieuse. Ils se croisent à une soirée costumée chez le nouveau locataire de leur immeuble. Lui est déguisé en Joe Dassin, elle en fantôme. Moyennant de fréquents retours dans leurs enfances, l’auteure trace à mi-voix et avec tendresse, comme dans un murmure, les chemins parfois chaotiques de ces deux solitaires qui finiront par se rencontrer. (Le Livre de Poche)

 

LevyJustine Lévy, La gaieté

La gaieté est le quatrième roman de Justine Lévy en deux décennies. Dans le premier, Le rendez-vous, la demoiselle d’à peine vingt ans réveillait des souvenirs d’enfance en faisant le portrait de sa mère, le mannequin Isabelle Doutreluigne. Dont la mort d’un cancer il y a une dizaine d’années était au centre de son troisième livre, Mauvaise fille, porté à l’écran en 2012 par son compagnon Patrick Mille. Entre les deux, dans Rien de grave, la fille de BHL avait donné libre cours à sa colère contre son mari, Raphaël Enthoven, parti avec Carla Bruni (pas encore Sarkozy). Tout cela sous des dehors romanesques, l’auteure n’hésitant pas à jouer avec la réalité et rebaptisant sa narratrice Louise et ses parents Alice et Georges.

Dans La gaieté, Louise a un compagnon et deux enfants. Elle qui, très tôt, «avant de savoir lire, écrire et compter», savait que «c’est la gaieté qui allait tout changer», était pourtant triste. C’est sa rencontre avec Pablo qui l’a sortie de cet état. Et ce parti-pris d’être gaie, encore balbutiant, s’est définitivement affermi à l’annonce de son premier enfant. Même si elle est encore, de temps en temps, victime de rechutes. Ce roman, finalement, ne raconte rien d’autre que la vie d’une famille parisienne aujourd’hui. Une photographie dans laquelle chacun, placé dans une situation proche, pourra se reconnaître. Il est par exemple question du regard amoureux porté par Louise sur son conjoint. Ou de sa peur. Auparavant, elle craignait «pour maman» qui abusait de médicaments et de vraies drogues. Aujourd’hui, ce n’est plus la fille mais la mère qui a peur «de tout». Et du lendemain. Ses enfants à peine nés, elle s’est demandé avec angoisse comment elle fera «quand ils seront grands». S’y préparant, elle s’en «attriste déjà».

Au fil de ce récit discontinu, d’une écriture souvent rapide, faite de bouts de phrases accrochées les uns aux autres comme les wagons d’un train, la narratrice voyage entre le passé et le présent. Elle raconte la douleur du manque d’une mère perdue trop tôt. Et l’amour d’un père qui, où qu’il soit (chez «les Afghans ? les Ingouches ? les Kosovars ?»), accourt au moindre souci, veillant aujourd’hui avec la même tendresse sur ses petits-enfants. Qui, semble-t-il, le lui rendent bien. (Le Livre de Poche)

 

FerneyAlice Ferney, Le ventre de la fée

Publié en 1993, le premier roman d’Alice Ferney, auteure qui a fait du chemin depuis (Dans la guerre, Les Autres, Cherchez la femme, Conversation amoureuse), vient seulement de paraître en poche. Du ventre de la fée, qui, avec l’homme qu’elle aime, se réjouit tant de cette naissance, sort un diable nommé Gabriel. Un garçon taciturne qui enferme les cadavres de petits animaux dans des boîtes en bois qu’il sculpte lui-même. Un adolescent grand et athlétique qui couvre les murs de sa chambre d’images «obscènes» en pétrissant la chair d’une fille qui tente de l’en empêcher, la pénétrant à son corps défendant. Et pire encore. Le corps des femmes est, pour lui, «une surface douce à griffer, une moiteur cachée à découvrir, une chaude niche qui se défend». Après la mort de sa mère et le départ de son père, il devient un monstre livré à lui-même, écumant la ville en quête de chair fraiche. Le Ventre de la fée  est un conte très intrigant, dérangeant même, porté par une écriture riche et intérieure. (Babel)

 

VallejoFrançois Vallejo, Métamorphoses

Drame pour Alix, spécialiste en art contemporain reconvertie dans la restauration de peintures anciennes : son demi-frère, avec lequel elle partage tant de beaux souvenirs d’enfance et devenu spécialiste en chimie moléculaire, s’est converti à l’islam radical. Que lui est-il passé par la tête ? François Vallejo, excellent auteur de Madame Angeloso, Ouest ou Les Sœurs Brelan, retrace l'itinéraire de ce parfait apprenti djihadiste: changement d’identité, étude de l’arabe et du Coran, camp d’entraînement, etc. Alix se lance dans une enquête, parvenant même à retrouver Alban, pourtant surveillé par la DCRI, qui lui annonce «un événement majeur». En creux, mettant en scène un jeune homme en quête de sens, en perte de repères, c’est le constat de la crise morale de la société que dresse l’auteur.  Publié en 2012, ce propos est plus que jamais d’une extrême actualité. (Points)

 

EnardMathias Énard, Remonter l’Orénoque

Mathias Enard prouve, avec son deuxième roman publié en 2005, qu’un grand roman ne se résume pas à son intrigue. Car de quoi est-il question ici, sinon d’un triangle amoureux classique. Dans le Paris caniculaire de l’été 2003, Youri le chirurgien russe aime la même infirmière qu’Ignacio, son ami et collègue vénézuélien marié et père d’une fillette. La jeune femme décide de remonter le fleuve vénézuélien comme pour remonter le temps, à la recherche de son père disparu lorsqu’elle était petite. Pourtant, Remonter l’Orénoque, porté au cinéma sous le titre À cœur ouvert, parle de bien d’autres choses. Et d’abord de la difficulté de vivre et d’aimer, l’auteur de Boussole, par son écriture baroque, flamboyante, poétique, s’aventurant dans les tréfonds de l’âme humaine. (Babel)

 

LadjaliCécile Ladjali, Shâb ou la nuit

Cécile est née «dans une grande maison en Suisse» où Robert (en fait Rabia) et Julie (en réalité Jeannine) sont allés la chercher en décembre 1971. Elle s’appelle alors Roshan. C’est le point de départ du roman autobiographique de Cécile Ladjali, professeure de littérature et auteure de plusieurs romans. Elle raconte son enfance, son adolescence, sa scolarité médiocre – ce qui lui vaut des coups de martinet –, sa conviction de n’être pas faite pour un «métier d’intellectuelle» – même si elle lit beaucoup, notamment de la poésie. Mais, jugée «limitée», elle se retrouve dans une filière technologique au milieu de «cas sociaux». Avant d’être réorientée vers la filière littéraire. On assiste à la mort de Robert, souffrant éternellement du dos et profondément hanté par sa Guerre d’Algérie – pays où il était né. Puis à celle, lente, de Jeannine. Et aussi à la naissance de son fils. Et aux retrouvailles avec sa mère biologique via une correspondance à laquelle, déçue par «cette adolescente attardée qui faisait comme si le passé n’avait pas d’importance», elle mit rapidement fin. (Babel)

 

VitouxFrédéric Vitoux, Il me semble désormais que Roger est en Italie

Ce très bref récit biographique – au titre magnifique décalqué d’un mot trouvé chez Stendhal – est à la fois l’histoire d’une révolution et le portrait d’une amitié. La révolution est celle vécue par Roger Tailleur, critique cinéma à Positif et à France Observateur, ardent défenseur des films américains, qui, peu après Mai 68, plaque tout pour se consacrer entièrement, exclusivement à l’Italie, tant sous ses aspects artistiques que géographiques, l’explorant région par région. Avant d’y vivre durablement. L’amitié, c’est celle qui le lie ensuite à Frédéric Vitoux, lui-même atteint dans ses jeunes années d’une «cinéphilie galopante» et collaborateur occasionnel à Positif dans la deuxième moitié des années 1960. Le futur Académicien, qui le reçoit plusieurs fois par mois à manger après son départ de la revue, le pousse à écrire sur sa nouvelle passion, en vain. Même si, l’été 1985, il semble être «sur le point de fléchir», non pour traiter tel ou tel sujet mais pour parler de lui, de ses voyages – ce qu’il ne fera jamais. D’autant plus qu’il meurt d’une leucémie le 15 septembre – une seconde mort –, au moment, étrange clin d’œil du destin, où son ami est en Toscane d’où il lui envoie une carte postale. Ne voulant y croire, Frédéric Vitoux écrit cet affectueux hommage à chaud, publié l’année suivante chez Actes Sud. Il s’interroge notamment, sans apporter de réponse, sur les raisons de ce basculement, dix-sept ans plus tôt, «vers le silence et l’isolement le plus absolu». (Équateurs parallèles)

 

EekhoudGeorges Eekhoud, La Nouvelle Carthage

La Nouvelle Carthage du titre de cette œuvre-clé de la littérature belge écrite en 1888, c’est Anvers à la fin du 19e siècle, ville natale de l’auteur. Élevé par son oncle, patron autoritaire d’une grande usine, Laurent Paridael s’éprend de sa cousine qui le dédaigne, lui préférant les salons. Leurs histoires à l’un et à l’autre seront particulièrement mouvementées, tant professionnellement qu’humainement et sentimentalement. Tandis que le jeune homme découvre le monde des ouvriers et des voyous de la ville et du port, sa cousine fait un mariage obligé qui échoue. Collaborateur à la revue littéraire La Jeune Belgique, Georges Eekhoud (1854-1927) est considéré, avec Camille Lemonnier, comme l’un des plus brillants représentants du naturalisme belge. À travers son roman, il fait le portrait de la Belgique à la fin du 19e siècle sous ses multiples aspects, sociaux, économiques, sociétaux, etc., dénonçant notamment les injustices sociales. L’intrigue, écrit Paul Gorceix dans sa postface, «n’est que le fil conducteur sur lequel viennent se greffer une suite de tableaux et de descriptions spectaculaires, un foisonnement de situations disparates et de situations hétérogènes, choisis en fonction des types qu’ils représentent.» (Espace Nord)

 

PaulhanJean Paulhan, Le Guerrier appliqué

Jean Paulhan est bien plus connu pour ses longs et précieux états de service chez Gallimard du milieu des années 1920 à sa mort, en 1968, principalement comme directeur de la Nouvelle Revue française dans l’entre-deux guerres, ou encore comme auteur des Fleurs de Tarbes en 1963 de la fameuse Lettres au directeur de la Résistance en 1952, que comme romancier. Le Guerrier appliqué, qui ouvre ce volume, rend compte, sous une forme semi-romanesque, de son expérience comme sergent chez les Zouaves où il n’est resté que quelques mois, blessé le jour de Noël 1914. Il raconte sa montée au front, les tranchées, ses premiers combats, ses premiers morts et l’évolution dans sa vision de la guerre. Les deux autres textes, Progrès en amour assez lents et Lalie, écrits en 1915 et 1916, sont de brefs textes de teneurs très différentes. Le héros du premier, soldat au repos dans un village, a une aventure avec une fille du coin. Et le deuxième, sur un ton détaché, conte les déambulations champêtres de Lalie et d’un jeune garçon de passage au village. (L‘Imaginaire)

 

 

ZenattiValérie Zenatti, Jacob Jacob

Jacob, le personnage qui donne son nom au roman de Valérie Zenatti, Prix du Livre Inter 2015, est un jeune juif d’Algérie parti combattre sur le sol français en 1944, alors que deux ans plus tôt, la France de Pétain l’avait exclu de son lycée. Il débarque en Provence au mois d’août avant d’aller mourir en Alsace, à 19 ans et 7 mois. Mais Jacob est, en vrai, le grand-oncle de la romancière. Dans ce roman, celle-ci fait revivre, dans un style envoûtant, la communauté juive de Constantine dans les années 1940 à travers une famille dominée par le père, patriarche rude avec les siens, et où la femme occupe une place bien peu enviable. La mère, Rachel, pleure l’absence de ce fils qu’elle aimait tant, qui illuminait la maison, et sa vie. Le benjamin de la fratrie, avide de lectures, qui portait le prénom d’un frère aîné mort à trois ans. Minée par la douleur, elle part à sa recherche, de casernes en casernes, avec ses victuailles. (Points)

 

FranceAnatole France, Histoire contemporaine

L’Orme du Mail, Le Mannequin d’osier, L’Anneau d’améthyste, Monsieur Bergeret à Paris : à travers ces quatre romans publiés entre 1897 et 1901 et regroupés sous le titre d’Histoire contemporaine, Anatole France offre un tableau panoramique de la France à la fin du 19e siècle, «un panorama coloré et satirique de la Belle Époque», comme le cerne François Taillandier dans la préface. Il choisit des personnages d’horizons très divers – clergé, administration, armée, aristocratie –, à Paris ou en province, pour mettre en scène les tensions propres à cette époque, notamment l’Affaire Dreyfus face à l’antisémitisme et les querelles religieuses entre la République et les cléricaux qui déboucheront sur la séparation de l’Église et de l’État. Le fil conducteur est Lucien Bergeret, personnage érudit malheureux en ménage qui discute de tous les sujets possibles avec son libraire. Avec cette tétralogie, l’auteur de La Rôtisserie de la reine Pédauque prouve, une fois de plus, que le roman est un merveilleux biais pour pénétrer la vérité historique, non seulement celle des faits et des événements mais, surtout, celle des mentalités et émotions. (La Petite Vermillon).

 

Michel Paquot
Juin 2016

 

crayongris2Michel Paquot est chroniqueur littéraire indépendant

 

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