Georges Bouillon, Sous le pommier

Bouillon«Sous le pommier : tel pourrait être le titre sous lequel faire paraître une anthologie de mes réflexions les plus emplies de sagesse», peut-on lire en ouverture de ce recueil qui paraît presque quinze ans après la mort de son auteur (1915-2001). «De nature foncièrement indépendante et tolérante, c’est l’intolérance que je n’ai cessé de traquer sous toutes ses formes», écrit celui qui rappelle avoir toujours refusé d’adhérer «à une religion, à une idéologie ou à quelque parti ou même syndicat que ce soit». «En tout, je ne me suis jamais exprimé qu’au nom de l’humanisme, tout en revendiquant mon individualisme», résume-t-il. Certaines de ses remarques sont tragiquement actuelles: «Qu’il y ait une religion dominante, passe encore, c’est chose courante, mais qu’elle se fasse dominatrice, voilà qui est intolérable.» On peut lire des descriptions sensibles de son pays, la Gaume à laquelle il est resté fermement attaché, des considérations sur l’éducation et les études, sur la réforme de l’orthographe, sur la liberté d’expression, sur l’écologie ou sur le changement trop souvent confondu avec la notion de progrès. Ou encore apprécier des réflexions historiques, principalement liées à Hitler et à la Seconde Guerre mondiale, celle de sa génération.

Celui qui se définit comme un «humaniste de gauche» prône, «envers et contre tous», une fidélité à soi-même à laquelle il n’a jamais dérogé. De même qu’il rejette la guerre : mieux vaut des paroles même «pas toujours justes» que des fusils «toujours injustes», pense-t-il. Et, plutôt que le patriotisme ou, pire, le nationalisme, il défend le civisme qui signifie «être citoyen du monde». On repère aussi quelques vacheries révélant que le «petit professeur de province, plus ou moins lettré», qui dit aimer le chou-fleur au gratin, les bons livres et les roses, n’était pas dénué d’humour: «Lu : "Coluche demeure grand pour l’éternité." – Pauvre éternité !». Ou: «De la Clo-clo-mania à la Bruel-mania, en passant par la Beatles-mania et la Johnny-mania, que de maniaques sans cervelle, que d’épidémies hystériques sans remèdes ! Mieux vaut ça que les explosions de violences dans les stades, mais…» Pour toutes ces sages pensées, on lui pardonnera sa détestation de la BD qu’il qualifie d’«abêtissement à la mode» et de «fausse culture».

Georges Bouillon, Sous le pommier (Memory)
 

Sorties de presse des ULgistes - Printemps 2016
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