Dès 4 ou 5 ans, même l'apprentissage du dessin est sexué, outils et contenus sont de plus en plus souvent différenciés, pour les filles crayons, bics, stylos, gommes, plumiers, trousses, roses, et paillettes argentées, avec ajouts de pompons, de breloques et de petits cœurs de ces mêmes couleurs, et livres de modèles et gommettes avec danse (ballerine), fleurs, petits poneys... sexués dès la première de couverture rose, comme le J'apprends à dessiner les Princesses, suivi du J'apprends à dessiner spécial filles en 2011(notons qu'en 2010 est sorti le J'apprends à dessiner les princesses et les chevaliers dont la couverture est violine, résultat subtil du mélange féminin/masculin),  J'habille mes amies les princesses et les fées, Gommettes et jeux : les Princesses, Mon cahier de gommettes: les Princesses. Aidé par des livres comme L'imagerie des Princesses⁴.

Et le rouge vermillon qui distinguait les vêtements de grande soirée de la première poupée Barbie (LA femme! passion, puissance, féminité ) s'est transsexué, voire transgenré, vers les garçons par le biais de la culotte à bretelles de Mickey et surtout de la rutilante carrosserie de Cars.

Pourtant, les princesses du Moyen Âge n'étaient pas habillées en rose, environ dès l'apprentissage de la marche et avant l'âge de raison, les filles comme les garçons portaient surtout du rouge protecteur et du vert signe de la jeunesse, puis ils étaient vêtus comme des mini-adultes ce qui sexuait, construisait et sexualisait physiquement et mentalement leurs attitudes, maintien, tenue et comportements inhérents et attendus par leurs familles et classes sociales. Du vert, du brun, du grenat, du rouge, etc. et si le bleu (bisexué) était très répandu, le rose ne l'était pas.

Aujourd'hui, du landau à ses 15, 16 ans minimum – de nombreux sex toys féminins sont roses et violine, menottes, vibromasseurs... indiquant ainsi leurs destinataires – la fille est plongée entièrement dans une crème à cupcake (dont les ustensiles, les moules et les présentoirs se déclinent en rose, tout comme le joli petit tablier qui s'assortit à la pâtisserie et au sucre glace, qu'on lui offrira également à 40 ans, vintage oblige!) sous les grands yeux de Hello Kitty l'ideal typisch kawaï.

Et une fois grandes, les dames princesses peuvent oublier travail, fatigue et soucis en se plongeant un instant dans les dessins et les rêveries des Princesses oubliées ou inconnues, Princesses oubliées ou inconnues Tome I, Princesses oubliées ou inconnues Tome II; Princesses oubliées ou inconnues Tome III⁵ à la lueur des bougies parfumées roses.

Ce totally rose est tellement présent dans la culture nord-occidentale que, à côté des histoires plus ou moins traditionnelles⁶ (lues dès le berceau Histoires de princesses) telle Les princesses,  Le chevalier, la princesse et le dragon, ou 16 histoires de belles princesses, Histoires de princesses et de chevaliers, Une histoire pour chaque soir à lire à toutes les petites princesses, Mon coffret livre cd Princesses, etc. on trouve déjà des livres qui interrogent ou vont à l'encontre de cette domination⁷, ainsi Rosalie et les princesses roses, 13 histoires maboules Princesses et Chevaliers et Marre du rose. Et que des représentations de princesses cherchent à s'éloigner du modèle américain ou dysnéen⁸, telle la princesse Fiona dans Shreck que les enfants connaissent plutôt par le film réalisé par Andrew Adamson et Vicky Jenson en 2001 que de l'album illustré de William Steig sorti en 1990, dont il est tiré, ou L'horrible petite princesse et La petite princesse nulle.

Sans oublier celles qui refusent le rôle que leur impose leur sexe de princesse⁹ La princesse qui détestait les princes charmants et qui réclament chevauchées, armes, batailles comme Le mystérieux chevalier sans nom et Rebelle. Celle qui n'a pas peur et veut un vrai dragon Le dragon de la princesse Tagada, celle qui n'en fait qu'à sa tête La princesse qui domptait les dragons et La princesse qui défiait les brigands, avec de l'humour La princesse, le dragon et le chevalier intrépide. Et celle qui même en s'appelant Rose n'a pas besoin d'un chevalier pour la défendre Et le loup mangea la princesse. Et lorsque le doute envahit la petite fille dont le reflet dans le miroir est loin de celui de Cendrillon, il y a des livres et des papas pour la rassurer Comme une princesse.

Le terme princesse actuellement est bien plus qu'un terme affectif, il englobe le rose, le bling bling, les robes, le clan, et il n'est pas rare de voir des petites filles de l'école maternelle repoussées par leurs camarades parce qu'elles ne sont pas habillées «comme des filles» (c'est-à-dire en robe rose) alors qu'elles sont en pantalon et/ou en vert ou brun, ou portent un tee-shirt avec un dragon vert ou Cars.