Adolphe Sax, entre gloire et adversité

sax-bourbonLes premières années passées à Paris s’avèrent difficiles pour Sax. Ses moyens financiers étant réduits, il loue un hangar rue Neuve-Saint-Georges où il établit son atelier et son domicile.

Le 6 juillet 1843, Sax franchit un cap important : il établit la « Société Adolphe Sax et Compagnie ». Pratiquement tous les dimanches, des concerts sont donnés dans l’atelier du facteur qui peut ainsi présenter ses dernières créations à un public de notables en tous genres.

 

Gloire et adversité

En France, Sax continue de participer aux expositions nationales et internationales, vitrines des progrès techniques. En 1844, il est présent lors de l’Expositions des produits de l’Industrie française. L’année suivante, sa carrière connaît un formidable coup d’envoi. La France se montre alors inquiète du déclin de ses musiques militaires. Sax saisit l’occasion et propose une réforme au Général Rumigny, ministre de la guerre. Encore une fois, le défi sera l’arme fatale de l’inventeur. Le 22 avril 1845, un concours est organisé sur le Champ de Mars entre le système traditionnel et celui de Sax employant saxhorns, saxotrombas et saxophones. Tout comme lors de son premier défi, le belge triomphe et sa proposition est adoptée. Il faut noter que Sax ne se soucie pas seulement de la qualité musicale mais aussi de l’organisation sociale des musiques militaires. Il propose en effet une réorganisation sociale touchant aux grades des différents membres qui la constituent.

atelier de paris

L’adoption du système Sax au sein des musiques militaires signifie que son atelier doit tourner à régime plein. Par ailleurs, elle suscite la jalousie des autres facteurs qui y voient un monopole injustement accordé à Sax. Autour d’Auguste Raoux se rassemblent donc de nombreux facteurs qui vont jusqu’à verser une cotisation pour que Sax soit traîné en justice. Il faut noter qu’à l’époque, la justice protège les faussaires d’avantage que les inventeurs, permettant à ces premiers de prolonger les procédures presque indéfiniment.

sax caricature

L’année 1846 marque le début d’une longue série de procès dans lesquels Sax est impliqué. Tous ses brevets sont contestés. On lui reproche non seulement de copier des instruments préexistant mais aussi de leur donner son nom. De plus, les facteurs cherchent à faire annuler le brevet du saxophone sous prétexte que celui-ci avait été dévoilé avant d’avoir été breveté. Dans son rapport de soixante-six pages, la commission d’experts chargée de l’affaire remet un avis entièrement favorable à Sax. Mais c’est sans compter avec la révolution de 1848 qui interrompt les procédures et suspend l’application du système d’organisation militaire Sax. Lorsque les procédures reprennent, le juge n’est plus le même et un avis nettement moins favorable à Sax est émis. Finalement, en 1854, l’honneur du belge est rétabli. Tous ses brevets sont validés, et ce, dans tous leurs aspects. Si Raoux et ses alliés sont condamnés à 10 000 francs de dommages et intérêts, Sax y a perdu une somme bien plus importante.

Adolphe Sax caricaturé en jeune Sylphide
par Ét. Carjat ©BNF, Paris

Le saxophone

1er grand prix1846 est également l’année lors de laquelle Sax fait breveter le saxophone. L’instrument avait déjà été présenté à plusieurs reprises lors d’expositions internationales, mais toujours de façon dissimulée. Les expérimentations ayant mené à ce nouvel instrument dataient probablement de l’époque où l’inventeur vivait encore à Bruxelles. Le brevet indique que Sax était à la recherche d’un instrument ayant à la fois le timbre des cordes mais aussi la puissance des vents. Il n’est donc pas étonnant que l’instrument soit employé pour la première fois au sein des musiques militaires. C’est également dans ce cadre que les premiers cours de saxophone sont dispensés à l’École de musique militaire installée dans les bâtiments du Conservatoire national.

En 1853, on découvre une tache noire sur le visage de l’inventeur. Les médecins lui prescrivent alors des remèdes allant du repos à la prise de tisanes et de doses d’iodure de potassium et d’autres substances. Alors que Sax ne souffre pas durant les premières années de cette maladie qui s’avère être un cancer, son état se détériore à partir de 1856, l’empêchant de se nourrir et le privant de sommeil. Convaincu d’être condamné, il dépose ce qu’il croit être un dernier brevet et dicte des mémoires ainsi que des croquis pour d’autres inventions. De manière tout à fait inattendue, Sax guérit grâce à l’intervention de celui qu’on surnomme le « docteur noir », un médecin javanais.

Sax reprend alors les expositions universelles et internationales. En 1851, il est présent lors de la première exposition universelle au Crystal Palace à Londres et en 1855, il expose à Paris où il reçoit la plus haute distinction : la Grande médaille d’honneur. En 1862, il expose plus de deux cents instruments à Londres. Cinq années plus tard, il participe à sa dernière exposition qui marque l’apogée de sa carrière : il est distingué devant 486 autres facteurs et reçoit seul le Grand Prix. Bien qu’il ne cessera jamais ses activités, sa faillite est prononcée à plusieurs reprises.

Adolphe Sax meurt à son domicile en 1894. En 1928, son fils vend la Société Adolphe Sax et Cie à la Maison d’instruments Selmer qui compte encore aujourd’hui parmi les meilleurs fabriquants de saxophones.

200francsbelges

 

Adèle Querinjean
Novembre 2014

 

crayongris2Adèle Querinjean est étudiante en Musicologie à l'ULg. Comme saxophoniste, elle bénéficie du statut d'étudiant-artiste.

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