Coup de projecteur sur le polar français

LoevenbruckHenri Loevenbruck, Le Mystère Fulcanelli

Parus en 1926 et 1930, Le Mystère des Cathédrales et Les Demeures philosophales sont considérés dans le monde alchimiste comme deux livres majeurs. Mais la véritable identité de leur auteur, Fulcanelli, n’a jamais été divulguée. L’un des seuls à la connaître fut son préfacier et exécuteur testamentaire, Eugène Canseliet, mort en 1982 avec son secret. Henri Loevenbruck a mené, après bien d’autres, sa propre enquête. Et il est arrivé à une hypothèse qu’il expose dans son nouveau thriller dont le héros est Ari Mackenzie, présent dans deux de ses précédents romans, Le Rasoir d’Ockham et Les Cathédrales du vide. Engagé par la fille d’un bibliophile retrouvé mort et dont un carnet appartenant à Fulcanelli a été volé, l’ancien analyste aux Renseignements généraux voit son chemin parsemé de morts appartenant tous à une confrérie secrète, les Frères d’Héliopolis. Et c’est bientôt un nouveau mystère qui se présente à lui: la possible existence d’un troisième ouvrage de Fulcanelli dont le titre, Finis Gloriae Mundi, est celui d’un tableau de Juan de Valdés Leal exposé dans l’église de la Santa Caridad à Séville. (Flammarion)

 

minierBernard Minier, N’éteins pas la lumière

Le soir de Noël, une journaliste radio hantée par le suicide de sa sœur aînée à 16 ans reçoit la lettre anonyme d’une femme qui la culpabilise en affirmant vouloir se suicider. S’ensuivent des messages menaçants lors de son émission. Puis des accusations de harcèlement de la part d’un collègue. Une intrusion dans son appartement. Et la police qui la prend pour une dangereuse affabulatrice! L’une des «preuves» brandies contre la jeune femme pour ruiner sa défense sont des mails peu équivoques qu’elle aurait envoyés à une stagiaire depuis son ordinateur. Parallèlement, Martin Servaz, enquêteur à la criminelle en repos dans une institution pour policiers dépressifs, est incité par de mystérieux messages à rouvrir le dossier sur le suicide d’une peintre un an auparavant. Ses investigations l’amènent à plonger dans l’aventure aérospatiale via un journaliste qui a lui-même travaillé sur une autre histoire de harcèlement. Et à rencontrer une étrange spationaute. Inspiré par le travail de Marie-France Hirigoyen sur le harcèlement et les manipulations mentales, l’auteur de Glacé et du Cercle signe un puissant thriller qui met le lecteur dans d’un état de stress continu, rendant de plus en plus imprécise la frontière entre la vérité et l’affabulation. (XO Éditions)

 

bussiMichel Bussi, N’oublier jamais

Comment la jeune femme retrouvée morte sur une plage peut-elle avoir, nouée autour du cou, l’écharpe rouge que le joggeur lui a tendue quelques minutes plus tôt, juste avant qu’elle se jette de la falaise? Aidé par une jeune fille croisée par hasard, le jeune homme se met à la recherche des deux témoins du drame, une vieille dame et un homme au blouson fatigué. Tout en recevant des enveloppes contenant des extraits de presse relatifs à un fait divers similaire survenu dix ans auparavant. Des éléments déconcertants font vaciller ses repères: pourquoi le journal local ne parle-t-il pas de ce fait divers? Pourquoi y a-t-il tant de points communs entre les deux mortes? Pourquoi les témoins sont-ils introuvables, comme s’ils n’avaient jamais existé ? Qui tire les ficelles de tout cela? Et dans quel but? Cette intrigue est en outre jalonnée des lettres échangées par des gendarmes au sujet d’ossements humains retrouvés dans la même commune, quelques mois plus tard, suite à l’effondrement d’une falaise. Le lien entre ces deux histoires est totalement inattendu et particulièrement imaginatif. (Presses de la Cité)

 

 

AbelBarbara Abel, Après la fin

Il y a deux ans, dans Derrière la haine, l’auteure belge racontait dans quelles circonstances Tiphaine et Sylvain Géniot avaient adopté le fils de leurs voisins. Huit ans ont passé, le garçon a quinze ans, et, au début d’Après la fin, une nouvelle famille vient s’installer dans la maison mitoyenne de la leur. Il s'agit d’une femme séparée et de ses deux enfants de 13 et 8 ans. Le couple est plutôt rassuré, il ne devrait pas être embêté, même si cette arrivée fait rejaillir chez Tiphaine de douloureux souvenirs mal enfouis liés à la perte de leur fils treize ans plus tôt. Au début, tout se passe bien, les deux femmes s’apprécient, les familles s’invitent. Jusqu’à l’entrée en scène du mari de la nouvelle voisine, un avocat, qui lui révèle le drame qui s’est déroulé jadis dans sa maison. Tout commence alors à déraper. Les thrillers de Barbara Abel tirent leur principale force de la manière dont elle parvient à distordre une situation a priori tout à fait normale par le simple dérèglement psychologique de personnages perdus entre réalités, peurs et fantasmes. Individus dont Tiphaine est un magnifique exemple. (Fleuve noir)

 

bardeOlivier Barde-Cabuçon, Tuez qui vous voulez

En 2012, dans Casanova et la femme sans visage, Olivier Barde-Cabuçon a créé un commissaire dont le terrain d’action sont les «morts étranges» - mais les morts criminelles ne le sont-elles pas toutes? Avec cette troisième enquête, après Messe noir, il confirme que la reconstitution du Paris du milieu du 18e siècle, avec ses artisans et ouvriers et ses rues boueuses et malodorantes, l’intéresse autant que l’intrigue elle-même. Lors d’une nuit festive organisée par Louis XV à la Noël 1759, un étudiant en médecine d’origine russe est retrouvé assassiné. Il a langue coupée, comme deux morts découverts peu avant. Et voici Volnay, toujours accompagné de son père vêtu comme un moine, parti sur la piste du tueur, main dans la main avec Sartine, le lieutenant de police. Trio qui panique lorsqu’ils s’aperçoivent que quelqu’un veut ressusciter la très transgressive Fête de fou propice à tous les débordements. Au cours de cette enquête menée avec vélocité, et contée avec un humour qui en allège la dimension tragique, on croise aussi le chevalier d’Éon et les jansénistes liés à des guérisons miraculeuses. (Actes Sud)

 

 

 

Michel Paquot
Juin 2014

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